jeudi, 22 mars 2012
Une interview de Rudy Martel, éditeur
« Benjamins media, des livres-CD pour tous les enfants »
Rudy Martel, vous êtes éditeur de Benjamins Media
En fait nous sommes trois : Sophie Martel, Ludovic Rocca et moi - avec chacun des missions propres : pour moi ce sont les salons, les animations, pour Sophie le budget, et pour Ludovic la réalisation sonore.
Quel âge a Benjamins Media ?
L'association Benjamins Media a été créée en 1987 par Régine Michel avec une bande de copines (et de copains) qui gravitent encore tous autour du livre, de la petite enfance et de la psychologie de l'enfant.
De 1988 à 1998, avec l'autorisation de Bayard presse jeunesse, Benjamins media a édité en version braille et sonore (des cassettes à l'époque) les « Belles histoires de Pomme d'api ».Le principe était déjà posé : histoire interprétée par des comédiens ou des conteurs, mise en musique, mise en sons.
A partir de 1998, benjamins média crée sa propre collection de livres audio pour enfants ; c'est « J'écoute, je découvre, j'imagine ». On propose alors deux types de produits : soit le livre et le CD, soit le livre, le CD et le livre en braille pour un public qui ne voit pas, parents ou enfants.
En 2006, avec le départ de Régine Michel, on remet tout à plat. On réalise en effet que « Je découvre, j'écoute, j'imagine » était moins le titre d'une collection que le principe de notre démarche éditoriale : créer des images à l'oreille de l'enfant pour l'amener du plaisir d'écouter au plaisir de lire.
On propose donc aujourd'hui trois collections de livres-CD : Taille S, Taille M, Taille L. Cela donne plus de clarté et de visibilité à notre démarche. Taille S où est paru «Mon Tipotame»(1) s'adresse aux enfants dès 15-20 mois. La Taille M s'adresse aux 3-5 ans avec des histoires plus longues et une mise en forme sonore plus soutenue. On y trouve «Mini Rikiki Mimi»(2). La Taille L propose à de jeunes lecteurs à partir de 5-6 ans des histoires plus «décalées» qui peuvent durer jusqu'à 45 minutes ; le dessin y est beaucoup plus pointu, avant-gardiste même, comme dans «Le Papa-maman»(3).
Pendant longtemps j'ai pensé que benjamins media s'adressait prioritairement à un public d'enfants malvoyants. Mais depuis un certain temps, j'ai remarqué, que sur le catalogue, figurent la mention « Benjamins media, des livres-CD pour tous les enfants». Cela correspond-il à une nouvelle démarche éditoriale ?
Nous sommes les seuls en Europe à proposer sur l'ensemble de notre ligne éditoriale un titre également accessible à des enfants ou parents déficients visuels. Pendant dix ans, on s'est adressé à des parents aveugles d'enfants voyants ou à des parents voyants d'enfants aveugles. En 1998, on a décloisonné notre démarche éditoriale, Ne plus parler de « livres en braille » mais de livres adaptés nous a permis de toucher un public plus large, même si cette image d'éditeur de littérature adaptée continue de nous coller à la peau. Pour y remédier deux choses :
Première chose : aujourd'hui, pour la première fois, on va vraiment au bout de notre logique en proposant du gros caractère - en plus du braille - on répond là à la plus demande de tous les déficients visuels, qu'ils soient aveugles et malvoyants.
Deuxième chose : on communique différemment en disant tout haut ce que nous faisons du livre CD pour les enfants en général : on s'adresse aussi bien à des enfants ordinaires, qu'à des enfants handicapés (malvoyants, aveugles, dyslexiques,...)
Cependant vous avez une spécificité ?
Effectivement et cette spécificité, c'est la mise en forme sonore des histoires.
Nous avons un studio d'enregistrement, un réalisateur sonore qui fait de la prise de son, de la prise de voix, qui compose de la musique comme dans « Noâr le corbeau »(4) et qui fait du montage. Ce qu'on sait bien faire pour nous, on le fait pour d'autres éditeurs. On travaille ainsi pour trois éditeurs parisiens : Talents Hauts, Alzabane et, peut-être, Escabelle, petite maison d'édition avec qui on devrait préparer un recueil de comptines. C'est un moyen de diversifier nos sources de revenus. On a désormais quatre activités : l'édition, l'animation, la prestation sonore extérieure, et on est en train de se lancer dans le livre numérique.
Comment choisissez-vous les histoires ?
Comme dans toutes les maisons d'édition, il y a un comité de lecture qui sélectionne les manuscrits en fonction de certains critères. Critère d'âge avec des textes qui s'adressent à des enfants entre 15 mois et 7 ans et qui peuvent donc s'inscrire dans l'une de nos trois collections Taille S, Taille M ou Taille L. Critère de qualité avec des histoires bien écrites - ça paraît évident – et aussi porteuses de sens. Et dernier critère : une histoire qui se prête à une bonne mise en forme sonore : mais de plus en plus, je pense que ça n'a pas lieu d'être parce que tout dépend du talent du réalisateur sonore.
Vous pouvez m'en dire plus sur les histoires porteuses de sens ?
Par exemple « Le monstre mangeur de prénoms »; il mange le prénom des enfants, syllabe par syllabe, pour pouvoir exister. Dans cette histoire, il y a une intrigue, des rebondissements et, en toile de fond, la quête d'identité, la perte d'identité, l'esprit d'initiative de l'enfant. Nous, on aime bien les histoire qui disent des choses sans que le message soit téléphoné. « Mon Tipotame »(1) aussi est un bon exemple. Le héros (un jeu de bain) a deux problèmes : le petit garçon à qui il appartient ne joue pas souvent avec lui et en plus il écorche son nom ; alors Tipotame part au zoo chercher de la compréhension - à défaut d'amis. Il n'en trouve pas, et le papa hippopotame du zoo va même souffler dessus et le renvoyer à la maison où il va se retrouver coincé dans une porte et se dégonfler. Le petit garçon va alors le regonfler et le réconforter. Moralité : ce n'est pas la peine de chercher bien loin ce qu'on a à la maison. L'histoire dit ça, mais elle le dit sans le dire et c'est ce qu'on aime.
Dans les premières parutions de benjamins media, j'ai remarqué beaucoup d'histoires sur la différence...
Effectivement, pas forcément le handicap, mais la différence. « Le Monstre mangeur de prénoms » est une histoire sur la différence, « Noâr le corbeau »(4) aussi, On va sortir un titre sur un géant mélomane qui est rejeté parce qu'il est grand, ce qui ne l'empêche pas d'être très sensible à la musique. Nous proposons aussi des histoires touchant d'autres sujets forts: la la séparation, la peur du monde qui nous entoure, et des sujets moins forts mais tout aussi porteurs de sens comme la gourmandise dans « Quoi, quoi, quoi ? dit le chat » par exemple.
Est-ce que le fait d'être au départ une association pour les malvoyants influe sur votre façon de réaliser ?
On n'est pas les seuls à faire du livre audio. D'autres le font aussi très bien, à leur façon - Gallimard et sa collection « Coco », notamment.
Mais il n'y a pas d'équivalent au style benjamin media. Nos images sonores sont adaptées à des enfants qui ne voient pas bien ou pas du tout. Il faut que les enfants déficients visuels aient à l'oreille l'image qu'ils n'ont pas sous les yeux. C'est pourquoi on parle plus de paysages sonores que de bruitages. Le son est mis en scène. Il va aussi souvent précéder la narration - ce qui n'existe pas chez les concurrents. Et même pour un enfant ordinaire, que le son précède la narration l'aide à développer son imaginaire. Il faut questionner l'enfant avec le son, qu'il se dise : qu'est-ce que j'entends ? Dans « Petit chat découvre le monde »(5), l'enfant peut se poser des questions : pourquoi il miaule ? Est-ce qu'il a faim ? soif ? Est-ce que sa maman est partie ? La narratrice va alors venir le conforter ou pas dans ce qu'il a imaginé. Claire Ubac a écrit ce texte pour nous il y a plus de dix ans et ce titre, d'une très grande sensibilité est indémodable.
Est-ce que vous avez des auteurs labellisés benjamins media ?
Christine Beigel qui a écrit « Il faut sauver le prince Victor »(6) et « Riki rikiki mimi »(2) est le premier auteur que nous publions deux fois. En fait on a toujours travaillé avec des auteurs et des illustrateurs différents. Ce n'est pas un choix délibéré. Quand le texte est bon, il n'y a pas de souci. On aimerait beaucoup retravailler avec Amélie Jackowski qui a illustré Noâr. Elle est brillante. On lui a demandé de nous proposer un projet de livre avec un texte de Ramona Badescu pour notre Taille S. Jusqu'à présent , on ne passait pas de commande, mais maintenant on a davantage confiance en nous et on n'hésite plus à aller voir des gens qu'on aime, qu'on ait travaillé avec eux ou non auparavant
Il y a des auteurs qui vous proposent des textes ?
On en reçoit, d'auteurs édités ou pas. On lance aussi des appels à manuscrits sur notre site ou auprès de la Charte des auteurs et illustrateurs, et on passe aussi des commandes. On a longtemps attendu la perle rare, mais c'est mieux d'aller la chercher.
Vos réalisations préférées ?
« Mon tipotame »(1), mais j'aime aussi beaucoup « Mini Rikiki Mimi »(2) parc que la mise en forme sonore me touche ; elle parle à l'enfant que je suis resté. En fait, c'est une question d'alchimie : quand tout est bien imbriqué : l'illustration, la mise en forme sonore, le texte. Pour ces deux titres, l'alchimie est là mais je pourrais aussi citer « Noar le corbeau » ou « Le papa maman ».
Vos projets ?
On sort trois titres cette année : deux tailles M et une taille S, avec une histoire écrite par Marie Nimier que j'ai rencontrée au salon du livre de Deauville l'année dernière. Elle nous a écrit une histoire sur les deux mains, droite et gauche. Pour l'illustration, on va travailler avec Thomas Bass et pour la musique, Elise Caron. Un rêve se réalisepour nous avec le concours de ces trois artistes ! La taille M, c'est un texte d'Anne-Lise Heurtier sur un géant mélomane. Le livre sera illustré par Cécile Gambini et pour la musique ce sera du blues. On a un autre projet mais qui n'est pas trop abouti encore, je préfère donc attendre pour en parler. Et l'année prochaine, il y aura une nouvelle Taille L. En résumé, des tailles de livres pour toutes les tailles d'enfants !
notes :
(1) Jeanne Cappe, Mon tipotame , album illustré par Ed. (coll. Taille S)
(2) Christine Beigel, Mini Rikiki Mimi, album illustré par Laurent Moreau. (coll. Taille M)
(3) Angelina Galvani , Le Papa-maman , album illustré par Zeina Abirached. (coll. Taille L)
(4) Guy Jimenez , Noâr le corbeau , album illustré par Amélie Jackowski. (coll. Taille L)
(5) Claire Ubac, Petit chat découvre le monde , album illustré par Julia Wauters. (coll. Taille S)
(6) Christine Beigel , Il faut sauver le prince Victor , album illustré par Raphaëlle Laborde-Barbanègre
COUP DE CŒUR
. Jeanne Cappe : Mon tipotame .
Album illustré par Ed
lu par Vincent Leenhardt, réalisation sonore Ludovic Rocca
Benjamins média, collection Taille S, livre CD
Paru en 2012
Poum, le petit hippopotame en plastique se sent un peu négligé par son jeune propriétaire qui ne sait même pas prononcer son nom correctement. Alors Poum part au zoo voir les vrais animaux ; là au moins, on saura s'occuper de lui... c'est du moins ce qu'il croit.
L'histoire en elle-même retient déjà l'attention : pleine de fantaisie, simple et joliment écrite, elle est aussi proche du quotidien des tout-petits, et très juste au point de vue psychologique. Les jeunes enfants s'identifient d'emblée à ce petit personnage « tout doux, tout rond et mignon tout plein » croqué avec humour par l'illustrateur argentin Ed dans le petit album carré.
Mais ce qui ajoute encore au charme de ce livre CD, c'est la mise en scène sonore qui accompagne le récit : les paysages sonores qui recréent l'atsmosphère de la salle de bain, de la rue ou du zoo, la musique de Ludovic Beier qui accompagne Poum dans ses pérégrinations – sans oublier le récitant clair et tranquille et les interventions d'enfants, d'une grande justesse.
A partir de 2 ans
mercredi, 21 mars 2012
Quelques CD et livres-CD pour les tout-petits
Gibus : Berceuses pour petites noctambules
album illustré par Marie Malher
Didier jeunesse, collection Eveil musical livre-CD
parution 25 janvier 2012
Un livre-CD « doudou » tout tendre et tout câlin pour accompagner les touts -petits vers le sommeil. Sept chansons de création par un chanteur pour enfants venu de Belgique. Sa voix douce, légèrement voilée, chuchote et rassure quand il évoque le rite du coucher ou rappelle comme dans les berceuses traditionnelles que si dehors il fait noir et pluvieux on est à l'abri dans son petit lit. Des chansons qui , pour être simples , n'en sont pas pour autant simplistes avec un vocabulaire choisi et des arrangements qui intègrent les bruits de nature. On trouvera les paroles dans l'album dont la présentation est parfaitement adaptée à la manipulation par de petites mains maladroites : petit format, grosses pages cartonnées, angles arrondis.
Ce titre est le dernier d'« Eveil musical », collection de bonne tenue qui, à défaut d'être vraiment originale se signalait déjà par la qualité de ses compilations et les images de son unique illustratrice (Cécile Hudrisier). Jusqu'à présent cette série se contentait de puiser dans le riche catalogue de Didier jeunesse pour des recueil de chansons et comptines sur des thèmes qui « marchent » : la gourmandise, le sommeil, les animaux de la ferme, Noël. En proposant une création et en invitant une nouvelle illustratrice, ces « Berceuses pour petits noctambules », lui ont fait prendre un nouvel essor
Dans la même collection :
Comptines pour faire dodo
Comptines pour danser
Comptines pour les gourmands
Comptines pour chanter la ferme
Chansons pour fêter Noël
Comptines pour chanter la savane
Christine Laveder : Histoires comme chats
A tireLarigot Compagnie, distribué par Raymond et merveilles, CD
Elle a beau chanter « J'aime pas les chats », on sent tout de suite que Christine Lavéder est complètement entichée de ces mangeurs de souris tour à tour ronronnants et griffus. Ils sont ici le prétexte à une joyeuse farandole de virelangues, de chansons, de jeux de doigts et de vrais contes. Je vous recommande tout particulièrement « Chat noir », qui reprend le thème du gros chat gourmand.
Un vrai bonheur d'écoute avec une interprète enjouée, malicieuse, pétillante qui jalonne son récital d'onomatopées, de chansons, d'allitérations. Elle a invité deux copines conteuses (Annie Gallay et Béatrice Maillet) qui l'accompagnent à l'occasion dans une polyphonie de chat ou pour lui donner la répliqu ainsi que Michèle Bernard et son accordéon.
Un excellent répertoire pour les petits. Avec les paroles des chansons et des virelangues dans le livret dont la belle mise en page et les calligrammes signés Sophie Catelot auraient mérité de figurer dans un véritable album.
Et aussi : .
Pour les tout petits ,
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allez donc voir la sélection proposée par ce blog pour les tout-petits, dans la note du 9 novembre 2010 (avec un coup de projecteur sur la collection « Coco » chez Gallimard jeunesse)
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la collection « livres-CD » d'Enfance et musique (voir sur ce blog le coup de projecteur sur cette collection , note du 19 octobre 2010 )
et encore,
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Michèle Eliat , Nina à la crèche , Didier jeunesse - livre CD
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Michèle Moreau, Au bain mon lapin , Didier jeunesse - livre CD
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Steve Waring, Timoleon , Victorie/Ed. des Braques - livre CD
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Isabelle Caillard, Toudou , Enfance et musique - CD
- Samir Barris (Ici Baba), Chat qui se cache , Victor mélodie - CD
jeudi, 01 mars 2012
Billet d'humeur.... changeante !
Anne Roumanoff et les fables de La Fontaine
Encore un coup médiatique ! ai-je ronchonné en découvrant cette nouvelle collection dédiée aux fables de La Fontaine sous l'égide d'Anne Roumanoff. Atlas aurait-il épuisé le filon Marlène Jobert pour faire désormais appel à une humoriste bien connue des parents (acheteurs) ?
J'écoute donc à reculons (et sachez que ce n'est pas facile d'écouter en en marchant en arrière). Qu'est-ce qu'elle nous fait Anne Roumanoff ? Elle nous rebidouille une histoire à partir d'une fable de La Fontaine pour nous amener sur un plateau le texte de notre bon vieux fabuliste ... mais finalement, j'ai trouvé ça vraiment bien. (Seuls les imbéciles ne changent pas d'avis, comme chacun sait).
Bien sûr ces histoires sont faites sur mesure pour introduire la fable originale (pas si facile d'accès pour des enfants avec son vocabulaire du XVIIème siècle). Elle transpose ainsi « Le lièvre et la tortue » dans le cadre d'une classe d'aujourd'hui (assez joliment croquée), invente une hilarante histoire de fromager pour « Le corbeau et le renard » et réussit de croquignolets portraits d'ados mijaurées pour « La cigale et la fourmi ».
J'ignore si elle a elle-même des enfants, mais elle sait parler de leur monde ou retrouver tout simplement son esprit d'enfance. Elle est enjouée, rigolote, souriante, et si on retrouve dans ses histoires des voix des personnages qu'elle a déjà mis en scène, ce n'est guère gênant, bien au contraire.
Trouverait-on ces histoires aussi succulentes, si on les lisait simplement dans le livre... ou si quelqu'un d'autre nous les racontait ? Certainement non.
C'est une raconteuse professionnelle, Anne Roumanoff. Elle nous embobine avec son bagoût, mais on ne peut faire rien d'autre que l'écouter.
Maintenant, Il faut espérer que la collection ne tirera pas trop sur la corde. Ces trois premières histoires sont vraiment sympathiques, peut-être ne faudra-t-il pas trop exploiter le filon sous peine de lassitude. Pour l'instant ne boudons pas notre plaisir et partageons-le en famille.
Anne Roumanoff: Phildebert le lièvre et Huluberlue la tortue
Marie-Chantal la cigale et Eugénie la fourmi
Théo le corbeau et Maître Renard
Trois histoires parues chez Atlas
Albums illustrés par Grégoire Mabire
paru le 2 novembre 2011
Coup de coeur
Susie Morgenstern : La chemise d'une femme heureuse
ill. Batia Kolton, réalisation de Louis Dunoyer de Segonzac
Actes Sud junior, livre-CD
paru le 2 novembre 2011
En dépit de l'amour que lui porte son mari, le roi Georgieporgie XIII, la reine Annabellastella dépérit et refuse qu'il la touche... et donc... pas de descendance. On conseille au roi de divorcer, il refuse. La solution (inattendue ) passera par la gourmandise et les gâteaux et surtout.... le pâtissier !
Autant le dire tout de suite la conclusion de ce conte de sagesse n'a rien à voir avec le politiquement correct et c'est bien ce qu'on aime chez Susie Morgenstern. Elle dit son propre texte avec une gourmandise et une sensualité qu'elle fait passer avec infiniment de grâce ; et son accent ajoute un charme supplémentaire à son interprétation.
Soulignées d'un fin trait noir et dans des tonalités vertes, brunes et mauves, les illustrations du livre rappellent des images du début du XX ème siècle. Elles ont le même charme suranné que les chansons qui jalonnent l'histoire et qui, avec leur accompagnement au piano, ont un petit parfum de mélodie française, même si elle flirtent beaucoup avec le jazz.
A partir de 7 ans
J'ai bien aimé aussi
Guy Jimenes : Noar le corbeau
illustration Amélie Jacobsky , réalisation de Ludovic Rocca
raconté par Charo Beltram Nunes,
Benjamins média, collection taille L, livre CD
paru le 14 octobre 2011
Victime d'un mauvais sort, le bûcheron Joël se transforme, la nuit tombée en Barbedogre, tueur de corbeaux... Noâr se retrouve prisonnier dans son antre...
Trois bonnes raisons d'apprécier ce livre-disque :
D'abord l'histoire qui est plus complexe qu'on ne pourrait croire : l'affreux Barbedogre, tout méchant qu'il est, n'est au fond qu'une victime et c'est en dominant sa peur que Noâr va délivrer son bourreau de la malédiction qui pèse sur lui et rendre la vie à la clairière.
Ensuite la récitante : Charo Beltram Nunes dit ce conte d'une voix grave et ronde. Sans jamais nuire à l'excellence de sa diction claire et précise, son léger accent sud-américain qui fait sonner les consonnes ajoute un charme supplémentaire au récit.
Enfin, et c'est peut-être le plus réussi : la mise en scène sonore qui raconte parfois autant que la voix de la récitante : des bruitages agencés dans des séquences qui permettent de suivre les personnages et une guitare blues qui intensifie les moments dramatiques. Il est vrai que Benjamins média s'adresse aussi à un public d'enfants mal-voyants qui n'ont pas accès aux illustrations de l'album
Une très belle réalisation
A partir de 6 ans
Catherine Zarcate : Salomon et la reine de Saba
Oui Dire, 3 CD
Paru en 2010 (l'enregistrement date de mai-juin 2010)
Voilà des années que Catherine Zarcate porte en elle cette histoire mythique ; elle la raconte depuis 1986, et pour l'écrire, elle a compulsé des masses de documents dont elle donne la bibliographie (abondante) sur la pochette du disque. Ce conte venu du fond des âges fait appel à des traditions juives (pas seulement bibliques), mais aussi soufies, persanes et éthiopiennes. En fait c'est un kaléidoscope d'histoires qui mettent en avant la sagesse du grand roi Salomon. Tous les récits convergent vers sa rencontre et son union avec une autre personnalité exceptionnelle : la reine de Saba.
La parole de Zarcate fait image : on voit la reine, vouée à la virginité dès l'enfance, traverser la piste d'or à la rencontre de celui qui va l'en délivrer.
Il y a un petit arrière-fond féministe dans cette épopée et Catherine Zarcate déclare par ailleurs avoir « délibérément choisi [les histoires] qui étaient cohérence avec la paix dont le roi porte le nom. »
La conteuse est royale, somptueuse, magnifique comme d'habitude. On l'écoute au fil des trois CD (près de trois heures) sans aucune lassitude. Son racontage est ample, tranquille : c'est un fleuve qui avance majestueusement mais inexorablement.
La musique qui utilise des instrument exotique constitue autant une respiration dans le récit qu'un dépaysement. La conteuse s'accompagne à la tempura dont la fascinante sonorité nous entraîne sur le tapis volant de Salomon..
On peut écouter de bout en bout (pas de lassitude), mais aussi par épisodes (la plupart peuvent être écoutés séparément)
Pour tous à partir de 10 ans
Jacques Ferron : L’amélanchier.
adapté Denis Côté raconté par Johanne Marie Tremblay. Album illustré par Anne Sol
Planète rebelle (Collection Conter fleurette)
paru le 11 mars 2011
Souvenirs d'enfance de Tinamère de Portanqueu qui vit entre sa mère Edna et son père Léon avec qui elle entretient une relation privilégiée. Celui-ci fait la différence entre le « bon côté » des choses (le jardin, la maison) et le « mauvais côté » des choses (la rue, le monde extérieur).
C'est la réécriture d'un conte pour adultes créé en 1970 par un auteur très populaire au Québec. Si l'auditeur ou lecteur européen n'a pas toutes les clés pour appréhender cette histoire, il peut cependant en apprécier des aspects universels : la quasi-symbiose des personnages avec la nature, la vie surprotégée et l'émancipation finale de cette enfant unique. Coincée entre ses deux parents, la petite fille ne peut s'échapper que par des rêveries autour de Charles Dodgson et des personnages d'« Alice au pays des merveilles ».
Sur fond de paysages sonores qui replacent le récit dans son atmosphère rurale, Johanne Marie Tremblay - pointe d'accent québécois et élocution très claire - nous fait entrer dans cette histoire pas si facile d'accès qu'on n'appréciera vraiment que si l'on est en mesure de faire un recul sur sa propre enfance.
A partir de 11-12 ans